"Mais Jésus dit: " JE ne suis pas venu juger le monde, JE suis venu sauver le monde" Jean 12, 47

LA VICTOIRE DU CHRIST SUR
L'ESPRIT DU MAL


(Jean Paul II, Audience Générale 20 août 1986, Osservatore Romano, édition française 34)

      Nos catéchèses sur Dieu, créateur des choses invisibles, nous ont permis d'éclairer et de fortifier notre foi en ce qui concerne la vérité à l'égard du Malin ou « Satan ». Celui-là n'est certainement pas voulu de Dieu - souverainement amour et sainteté - dont la providence sage et forte sait conduire notre existence à la victoire sur le prince des ténèbres. La foi de l'Église nous enseigne en effet que la puissance de Satan n'est pas infinie. Il n'est qu'une créature, puissante du fait qu'il est pur esprit, mais toujours une créature, avec les limites de la créature, subordonnée à la volonté et à la puissance de Dieu. Si Satan agit dans le monde par haine contre Dieu et son Royaume, cette action est permise par la divine providence qui avec force et douceur dirige l'histoire de l'homme sur le monde. Si l'action de Satan cause certainement de graves dommages - de nature spirituelle et indirectement même de nature physique - pour chaque homme et pour la société, toutefois il n'a pas la faculté d'annuler la finalité définitive vers où tendent l'homme et toute la création, c'est-à-dire le bien. Il ne peut empêcher l'édification du Règne de Dieu, où à la fin se réalisera la totale actualisation de la justice et de l'amour du Père envers les créatures éternellement prédestinées dans le Fils-Verbe, Jésus-Christ. Nous pouvons même dire avec saint Paul que l'oeuvre du Malin collabore au bien et sert à édifier la gloire des élus.

      Ainsi toute l'histoire de l'humanité peut être considérée en fonction du salut total, dans lequel est inscrite la victoire du Christ sur le « prince de ce monde ». « Au Seigneur Dieu seul tu rendras un culte, lui seul tu adoreras » (Lc 4, 8), dit péremptoirement le Christ à Satan. En un moment dramatique de son ministère, à ceux qui l'accusaient d'une manière insolente de chasser les démons parce qu'il était l'allié de Béelzéboul, prince des démons, Jésus répondit par ces paroles sévères et en même temps réconfortantes: « Tout royaume divisé contre lui-même court à la ruine; et nulle ville, nulle maison, divisée contre elle-même ne saurait se maintenir. Or, si Satan expulse Satan, il s'est divisé contre lui-même, dès lors comment son royaume se maintiendra-t-il?... Mais si c'est par l'Esprit de Dieu que j'expulse les démons, c'est qu'alors le Royaume de Dieu est arrivé parmi vous » (Mt 12, 25-26, 28). « Quand un homme fort et bien armé garde son palais, ses biens sont en sûreté; mais qu'un plus fort survienne et le batte, il lui enlève l'armure en laquelle il se confiait et il distribue ses dépouilles » (Lc 11, 21-22). Les paroles prononcées par le Christ sur le tentateur trouvent leur réalisation historique dans la croix et la résurrection du Rédempteur. Comme nous le lisons dans la lettre aux Hébreux, le Christ a voulu participer à l'humanité jusqu'à la croix « afin de réduire à l'impuissance, par sa mort, celui qui a la puissance de la mort, c'est-à-dire le diable, et d'affranchir tous ceux qui [...] étaient tenus en esclavage » (Hb 2, 14-15). C'est la grande certitude de la foi chrétienne: « le prince de ce monde est condamné » (Jn 16, 11); « C'est pour détruire les oeuvres du diable que le fils de Dieu est apparu » (1 Jn 3, 8), comme nous l'atteste saint Jean. Le Christ crucifié et ressuscité s'est donc révélé ce « plus fort » qui a triomphé sur « l'homme fort », le diable, et l'a détrôné.

      L'Église participe à la victoire du Christ sur le diable: le Christ en effet a donné à ses disciples le pouvoir de chasser les démons. L'Église exerce ce pouvoir victorieux par la foi au Christ et la prière, qui en des cas spécifiques peut prendre la forme d'exorcisme.

      Dans cette phrase historique de la victoire du Christ, s'insère l'annonce et le début de la victoire finale, la Parousie, la seconde et définitive venue du Christ a terme de l'histoire vers lequel est tendue la vie du chrétien. Même s'il est vrai que l'histoire terrestre continue à se déployer sous l'influence de « cet esprit » dont saint Paul dit que « maintenant il agit dans les hommes qui résistent » (Ep 2, 2), les croyants se savent appelés à lutter pour le triomphe définitif du bien: « Ce n'est pas contre des adversaires de chair et de sang que nous avons à lutter, mais contre les Principautés, contre les Puissances, contre les Régisseurs de ce monde de ténèbres, contre les esprits du mal qui habitent les espaces célestes » (Ep 6, 12).

      La lutte devient en un certain sens toujours plus violente, à mesure que la fin approche, comme le met en relief particulièrement l'Apocalypse, le dernier livre du Nouveau Testament. Mais précisément ce livre accentue la certitude qui nous est donnée par toute la révélation divine: c'est-à-dire que la lutte finira par la définitive victoire du bien. Dans cette victoire, déjà incluse dans le mystère pascal du Christ, s'accomplira définitivement la première annonce du livre de la Genèse, qui en terme significatif est appelé protévangile, lorsque Dieu avertit le serpent: « J'établirai une hostilité entre toi et la femme » (Gn 3, 15). Dans cette phrase définitive, Dieu, complétant le mystère de sa providence paternelle, « arrachera à l'empire des ténèbres » ceux qu'il a éternellement « prédestinés dans le Christ » et les « transférera dans le royaume de son Fils bien-aimé ». Alors le Fils lui-même se soumettra à celui qui lui a tout soumis, afin que « Dieu soit tout en tous » (1 Co 15, 28).


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